En voici la preuve en 4 points :
# Les stades sont à des années-lumière d'être prêts à accueillir la compétition : sur les 12 arènes qui doivent accueillir la Coupe en 2014, seuls trois d'entre elles respectent le calendrier initial des travaux qui leur avait été imparti. Plusieurs ont vu leurs travaux être repoussés (ou même interrompus, dans le cas du stade de Porto Alegre) pour des recours en justice liés à d'appel d'offres pas toujours transparents, et trois d'entre eux (les stades de Natal, de Curitiba et de São Paulo) en sont encore seulement au stade de projet, ou quasi, près de quatre ans (!) après la décision de la FIFA d'attribuer la Coupe du Monde au Brésil. La situation à São Paulo est la plus ubuesque, où, après de nombreuses tergiversations et interventions politiques (dont celle, décisive, de l'ex-président -et corintiano- Lula), il a décidé de ne pas réformer le pourtant très beau stade du Morumbi, pour environ 200 millions de reais, mais de construire ex-nihilo une nouvelle arène dans le quartier paumé d'Itaquera, qui deviendra le stade résident des Corinthians, le tout pour la modique somme de...1 milliard de reais (financé à 80% par des fonds publics, cela va sans dire) !
Les stades et les villes en 2014 (cliquer pour agrandir) |
# Les infrastructures de transports sont encore très sous-dimensionnées : si l'état d'avancement des stades inquiète jusqu'au plus ardent des supporters de la Seleção, que dire des transports, et en particulier des aéroports, qui, dans 8 villes d'accueil sur 12, fonctionnent déjà bien au-delà de leur capacité théorique -il en résulte de nombreux retards, en particulier aux aéroports -saturés- de Guarulhos (São Paulo) et Galeão (Rio de Janeiro). Les travaux d'extension prennent un temps fou, à telle enseigne que la présidente Dilma elle-même a convoqué voici un mois une réunion interministérielle spécialement dédiée au sujet, où il a été décidé de privatiser la gestion des trois plus importants aéroports du pays (les deux premiers cités, et celui de Brasilia), dans l'espoir d'agréger de nouvelles ressources et d'accélérer le processus de réformes. Une autre crainte (plus que fondée dans le cas de la ville de Rio) est l'insuffisance des transports urbains dans de nombreuses villes, et quasiment rien n'a été entrepris pour l'instant pour améliorer la situation. Les supporters en 2014 devront sans aucun doute s'armer de la plus grande des patiences...
Files d'attente a l'aéroport de Guarulhos (SP) : vous avez dit bazar ? ;) |
# La CBF et son président Ricardo Teixeira sont très contestés : la CBF, c'est la Confédération Brésilienne de Football, l'équivalent de la FFF. Ricardo Teixeira, c'est son tout-puissant et polémique président, et ce depuis...1989, sans discontinuer ! Cette hégémonie à la tête du sport national lui a permis de se construire un réseau politico-économique de premier ordre, lui donnant un statut de quasi intouchable dans le pays, et ce malgré les innombrables malversations dont il aurait été l'auteur tout au long de son règne à la tête de la CBF. Chose hallucinante, il est même parvenu à faire du Comité Local d'Organisation de la Coupe du Monde (le COL) une société dont il est le seul actionnaire physique, et pourrait ainsi en pratique empocher personnellement l'intégralité des bénéfices que générera le COL ! Face à de telles pratiques, les amateurs de football (et les autres) se révoltent enfin : un Front National des Supporters s'est constitué, et mène actuellement une campagne intense (plus de 300.000 tweets en une semaine du hashtag #ForaRicardoTeixeira sur Twitter, par exemple) pour discréditer Teixeira, et demander aux députés d'ouvrir une enquête sur les pratiques de la CBF. Je doute que cela soit suffisant pour débouler celui qui vient, dans une subtile pirouette, de traiter les médias anglais de "corrompus" (en référence à l'attribution polémique de la Coupe du Monde 2022 au Qatar, où les anglais ont pourtant été superbement floués par la FIFA -dont Teixeira est un éminent représentant), malgré les nombreuses inimitiés qu'il s'est créées (au hasard au Brésil Pelé, Romario, Ronaldo...). Quoi qu'il en soit, ambiance très pesante...
Teixeira en dictateur jouant avec les bénéfices du COL... |
# La Seleção est aux abonnés absents : peut-être finalement la pire des nouvelles pour les 190 millions de torcedores (supporters) brésiliens, l'équipe nationale vit l'une des pires phases de son histoire : après l'ère Dunga qui s'est soldée par un retentissant échec au Mondial 2010 (et une élimination en 1/4 de finales par les Pays-Bas), l'espoir était revenu avec la nomination d'un entraîneur porté vers l'offensive (Mano Menezes) et l'éclosion de jeunes pépites telles Neymar ou Ganso. Mais la Copa America 2011, qui vient de s'achever sur la piteuse élimination du Brésil, de nouveau en 1/4 de finales face au modeste Paraguay, a douché les espoirs des plus fervents supporters : absence de fonds de jeu, niveau technique indigne de la Seleção, prétendus leaders -Julio Cesar, Lucio, Elano...- en méforme, choix tactiques contestés, le tableau est très sombre pour le Pentacampeão, tellement sombre que l'immense majorité des brésiliens, récemment interrogés par le newsmagazine Veja, parient sur un autre vainqueur que le pays-hôte en 2014 (à 83% !). Comment dans ces conditions laver l'affront subi en 1950, lorsqu'en plein Maracanã, le petit Uruguay battit à la surprise générale le Brésil en finale de la première Coupe du Monde jouée sur la terre de Pelé ?
Neymar : c'est la coupe le problème ? |
Bien sûr, il reste encore trois ans pleins au Brésil pour faire de "leur" Coupe du Monde une gigantesque fête réussie, mais il ne va pas falloir trop lambiner en cours de route maintenant : le compte à rebours est lancé, et il ne faudrait pas que les mauvaise augures qui tournoient autour de l'embryon "Copa do Mundo 2014" accouchent d'un bébé en phase avec les prémonitions pessimistes de la grande majorité de la population : toujours selon Veja, la Coupe du Monde rime plus pour l'instant avec "corruption" et "mauvaise image" qu'avec "football champagne" !
2 commentaires:
Il reste deux ans... Les Brésiliens ont construit une ville entière en quatre ans (Brasilia). Il y a donc de l'espoir.
Quant aux résultats sportifs, le vent tourne vite, très vite. Cf la France entre 1998 & 2000 par rapport aux douze années précédentes (& mis à part 2006, aux presque douze suivantes !).
http://davidikus.blogspot.com/
http://www.davidranc.com
Oh ils vont y arriver, je ne suis pas spécialement inquiet. C'est juste que cela va coûter deux à trois fois plus cher que cela aurait dû, et que il risque d'avoir une "dispersion d'argent" (sic) intense en raison des délais super serrés...
Enregistrer un commentaire