19 octobre 2010

Trancoso, Caraiva, le Bahia sauvage...

Si vous avez la chance de résider à Rio, vous savez combien il peut être compliqué de s'évader de notre Cidade Maravilhosa lors d'un week-end prolongé, ces fameux feriados qui parsèment le calendrier brésilo-carioca : embouteillages monstres pour quitter le centre-ville (ah le fameux pont de Niteroi on my way to Buzios, ouh la jolie Avenida Brasil rumo até Ilha Grande...). Sans compter qu'une fois enfin arrivés à destination, vous devriez avoir le "plaisir" de barboter dans une mini-cachoeira envahie par 500 congénères en tongs (à Itatiaia) ou encore de chercher une micro-place pour la serviette sur la praia do Azedinha à Buzios, en attendant que la marée ne vous repousse sur les rochers...

La ruse de sioux, à condition d'avoir un peu de sous et un chouia plus de temps qu'un feriado classique (hop je rajoute un jour ou deux pour faire de mon pont un viaduc), c'est de mettre la famille dans un avion (depuis Santos Dumont, s'il vous plait) pour en deux heures de vol rejoindre des coins paradisiaques et (beaucoup plus) isolés. Et c'est ce que nous avons fait lors du feriado de la semaine dernière ! Notre choix s'est porté sur la côte bahianaise, où l'abondance de biens marins ne nuit point, plus précisément au sud de la dite côte (à 700 km de Salvador tout de même...) : nous sommes ainsi partis à la découverte de la côte...du même nom (Costa do Descobrimento, en portugais), appelée ainsi car ce sont ici que les navigateurs portugais (Pedro Alvares Cabral, en 1500, puis Gonçalo Coelho, en 1503) ont abordé en premiers la terre de Brésil (qui ne s'appelait pas encore comme cela).

Le point de départ de cette fameuse côte (cf carte ci-contre), et sa capitale officieuse, en est Porto Seguro. Ville tranquille de 130.000 habitants lovée autour du cap du même nom, la cité abrite en sa partie haute les plus vieux vestiges de l'histoire portugaise au Brésil : les ruines de la première école jésuite du pays, l'église Matriz de la patronne de la ville, Nossa Senhora da Penha, et surtout la premier édifice religieux construit au Brésil (avant d'innombrables autres...), l'église São Francisco, érigée en 1525 (sous réserve ;). Porto Seguro abrite également quelques magnifiques plages sur sa Orla Nord -qu'en vérité nous n'avons pas expérimentées...je n'en dirais donc pas plus.

Ci-dessous quelques photos du centre historique de Porto Seguro.

Mais ce n'est pas à Porto Seguro où nous avons choisi de résider. Non, c'est une quarantaine de kilomètres plus au sud, là où la côte se fait plus sauvage, les villages plus "rustiques" et les plages -encore- plus accueillantes. A Trancoso donc (cf carte), hameau qui doit une partie de sa célébrité au fait qu'il héberge sur sa côte nord un très chic village du Club Med. Ce n'est pas au Club non plus où nous avons logé, mais à la vraiment très chouette (je parle comme le Guide du Routard moi ;) Pousada Mata Nativa, située à quelques encablures du centre du village (son superbe Quadrado, dont on va reparler) et toute proche également des plages (celle des Nativos étant à 200 mètres). 

Les plages, parlons-en : elles sont vraiment superbes, et variées, tout au long de cette côte où le sable courre sans discontinuer sur quasiment 100 kilomètres. 
- La Praia dos Nativos, donc, la plus proche du village. Belle et sauvage, avec sa mini-lagune aux eaux un poil saumâtres, il faut l'avouer ;
- La Praia dos Coqueiros, la plus fréquentée et la plus "envahie" par des cahutes vendant force cervejas et autres picadinhas à grignoter toute la journée. Musique com som alto, bien entendu !  
- Plus au sud, s'étalent jusqu'au charmant village de Caraiva les plages à la fois les plus belles et les plus sauvages : Praia do Rio Verde (et son excellent bar restau Pé na Praia), Praia d'Itapororoca ou encore la myhtique Praia do Espelho, régulièrement classée parmi les plus belles plages du Brésil. Par un terrible coup du sort météorologique, nous n'avons même pas pu en profiter ! Cela nous donne une bonne raison d'y retourner quand le ciel bahianais aura cessé de pleurer...
- Au nord de Trancoso, deux autres magnifiques plages : la Praia do Rio da Barra, et ses falaises ocres, et la Praia do Taipe, où nous avons dégusté un poisson (dont j'ai oublié le nom) à la saveur à se damner ! Petite cahute à découvrir donc, ci-dessous les photos ! 
La pousada Mata Nativa

Et Trancoso lui-même, alors ? Eh bien, le village est vraiment agréable, perdu au milieu de la Mata Atlantica, au pied d'une falaise offrant une superbe vue sur l'océan. Il doit il est vrai beaucoup de son charme au Quadrado, son immense place centrale à l'herbe clairsemée qui borde la falaise en son côté est, où trône, solitaire, l'église Matriz de Trancoso, carte-postale incontournable des lieux. Le lieu devient magique à la nuit tombée, des dizaines de loupiotes multicolores aux reflets doucement tamisés venant éclairer le pourtour de la place : autant de restaurants ou d'adorables boutiques de décos à découvrir au gré de sa balade nocturne...

Dernière belle découverte de la région, et pas des moindres. Celle-ci sait se faire désirer : il vous faut emprunter un chemin boueux (car oui il a beaucoup plu durant nos 5 jours de séjour sur place !) sur plus de 30 kilomètres pour arriver dans un nouveau bout du monde, éloigné de tout (sauf de l'ethnie native des Indiens Pataxo). Vous laissez votre voiture près du gué d'une petite rivière se jettant à quelques encablures dans l'océan, et vous voilà embarqués sur une pirogue hors d'âge. Le rio traversé, vous voici arrivés à Caraiva, un minuscule village de quelques centaines d'âmes, aux ruelles de sable gris, où les voitures n'ont pas droit de cité, où chaque habitation semble abriter une petite chambre qui peut faire office de pousadinha pour le routard émérite. Et puis la côte océane, belle, immaculée, aux plages de sable doré. Une sensation de zénitude incroyable, un endroit pour oublier la civilisation...

A vous de venir découvrir ces trésors de la riviera de Bahia !

03 octobre 2010

Présidentielle au Brésil : en route vers le second tour !

Second tour ou pas second tour ? C'était LA question que journalistes, commentateurs politiques et simples citoyens se posaient avant que les 135 millions d'électeurs qui composent le Brésil ne se rendent aux urnes, en ce dimanche grisâtre sur Rio. Dilma Rousseff, la candidate du PT, allait-elle réussir là où même le grand Lula, son modèle et mentor, avait échoué : se faire élire président(e) de la république fédérale du Brésil dès le premier tour de scrutin ? 
Le verdict vient de tomber : avec 46,7% des voix (soit près de 47 millions de votants), Dilma l'élève ne sera pas parvenue à dépasser Lula le maître. Pis, alors que les tous derniers sondages lui prédisaient tous entre 49 et 52% des voix, elle fait même moins bien que le président en titre lors du premier tour de 2006, où Lula avait collecté 48,6% des suffrages. La (relative) surprise vient du très bon score de la verte Marina Silva, qui obtient près de 20% des voix -elle réussit même la prouesse d'être en tête dans le District Fédéral de Brasilia. Cela ne lui suffira néanmoins pas pour être présente au second tour, le tucano (le toucan est l'emblème du PSDB) José Serra s'accrochant bien solidement à la deuxième place et recueillant les faveurs de près de 33% des électeurs.  

La carte des votes et les scores des candidats - le 3 octobre à 22:30
Les citoyens brésiliens ont donc décidé de s'accorder un second tour, qui aura lieu le 31 octobre prochain. La démocratie en sort à mon sens grandie : le plébiscite pro-Dilma avait quelque chose d'artificiel et de presque injuste pour les deux autres candidats, et les quatre semaines qui s'ouvrent ne seront pas de trop pour creuser la question des programmes et du Brésil que veulent chacun des candidats des deux grands partis qui occupent l'espace politique brésilien depuis la "redémocratisation", il y a maintenant 20 ans. 
Un mot sur l'Etat de Rio, où le gouverneur sortant Sergio Cabral, fort d'un bilan honorable (en particulier la baisse de la criminalité orchestrée par la mise en place des fameuses UPP dans les favelas de Rio), a mis une pâtée à son opposant Fernando Gabeira : 62% des voix exprimées contre 21% pour le président du PV (Parti Vert). Heureux qui comme Sergio...
Deux lignes également pour un peu d'autosatisfaction : j'avais annoncé ici le second tour, en surestimant même un peu Dilma (je lui prédisais 48,5%), mais en annonçant le score exact de Marina (19,5%) ! :)
Bref, on revient sur tout ceci sur le blog du Frenchman in Rio d'ici peu, en particulier le jeu des alliances -quelle sera la position de Marina ? Sera t-elle alignée avec la position de son parti ?...A suivre de près ! 

01 octobre 2010

Dernier débat de la présidentielle au Brésil : enfin (un peu) de fond !

Alors que je me désespérais dans un post précédent (cf mon petit espace Ola Brasil que m'ont gentiment ouvert les amis de chez Rue89) de l'absence totale de mise en avant des idées et des intentions programmatiques des principaux candidats dans la campagne présidentielle brésilienne qui s'achève (le vote du premier -et seul ?- tour a lieu ce dimanche 3 octobre),  un petit miracle est survenu lors du débat de ce jeudi soir, le tout dernier avant que les électeurs se prononcent, durant lequel les apprentis présidents ont rangé leurs couteaux et tu leurs vaines querelles pour enfin présenter quelques-unes de leurs "promesses" électorales.
Serra, Dilma et Marina à l'issue du débat de ce jeudi
On a ainsi pu apprendre en vrac et en fonction des thématiques soumises par le présentateur vedette de la Globo, William Bonner, que :

# Sur le droit du travail, Marina Silva (PV) et José Serra (PSDB) se retrouvaient pour estimer qu'il fallait créer un statut spécifique pour les nouveaux entrants sur le marché de l'emploi, en maintenant le niveau des droits tout en simplifiant les formalités administratives pour embaucher, afin de réduire le travail dit "informel" (estimé à 50% des emplois pour les deux candidats de l'opposition). Dilma (par ailleurs habillée comme un sac), sur ce terrain, a fait du Dilma, et s'est bornée à énumérer la réussite (réelle mais passée) du gouvernement Lula, qui aura créé près de 15 millions de nouveaux emplois en 8 ans de présidence.

# Sur les impôts et taxes, le jeune (80 ans) et socialiste Plinio Sampaio (PSOL) a annoncé qu'il voulait supprimer l'ICMS (une taxe imposant les transferts de services et de produits entre les Etats de la Fédération du Brésil), José Serra étant de son côté partisan d'une sorte de TVA zéro sur tous les produits dits de première nécessité (lait, pâtes, riz...), une mesure qu'il avait déjà institué en tant que gouverneur de l'Etat de São Paulo.

# Sur les retraites, Marina a annoncé la mise en place d'un système de "récupération du pouvoir d'achat" (sans rentrer dans les détails...) des retraités, tandis que Serra a promis une hausse de 10% du montant des retraites pour 2011, qui, couplée à son autre promesse de faire passer, dès 2011 là aussi, le salaire minimum à 600 R$ (vs 510 R$ aujourd'hui), sont des mesures qui vont "rendre du pouvoir d'achat" au peuple.

# Sur le logement, Dilma a sans surprise ressorti le bilan du programme "Minha Casa, Minha Vida" (j'en parle ici pour plus d'infos ;), et a annoncé que celui-ci serait étendu et amenagé pour servir en priorité les 2 millions de femmes vivant seules avec des enfants et sans logement décent. Marina, quant à elle, souhaite lancer un grand programme d'urbanisation des favelas du pays (un "Morar Carioca" national ?), sans toutefois en préciser le coût.

# Sur la sécurité, Marina souhaite augmenter fortement le salaire des policiers civils et militaires afin de les "aider" à résister à la tentation de la corruption.

# Sur le traitement des eaux usées (un point crucial au Brésil puisque seulement une petite majorité -59%- des domiciles brésiliens bénéficient du tout-à-l'égout), Marina a annoncé qu'elle voulait investir plus de 45 milliards de reals (!!) en 4 ans pour parvenir à un taux de 100% d'ici à la fin 2014.

# Sur la santé, Plinio a annoncé qu'il souhaitait désormais consacrer 10% du PIB du pays (contre un peu plus de 4% aujourd'hui) au secteur de la santé et à son amélioration.

# Sur les mesures sociales,  on a quand même eu droit à une petite passe d'arme entre Serra et Dilma, les deux s'attribuant la paternité de la fameuse Bolsa Familia (une allocation de ressources pour les plus démunis). Serra a ainsi souligné que les programmes Bolsa Alimentação et Bolsa Escola du gouvernement de FHC (1995 à 2002) étaient les "inspirateurs" de la Bolsa Familia, instituée par Lula en 2004 (cette dernière atteignant une échelle bien plus élevée, il est vrai). Serra a promis qu'il maintiendrait et renforcerait le dispositif s'il était élu...

Bref, dans ce débat, on en a plus appris en deux heures sur les intentions des uns et des autres qu'en quasiment deux mois de campagne ! Le plus saisissant, c'est que les médias (en particulier les opposants à Lula et Dilma, le quotidien O Globo et le newsmagazine Veja) ont été très critiques sur la teneur des discussions, regrettant presque l'absence de polémiques (O Globo s'était spécialisé dans les titres "Serra attaque Dilma qui attaque Marina qui attaque Serra...") et le ton prétendument "morne" du débat. Celui-ci fut pourtant le plus consistant (et de loin), le plus courtois (ce qui n'est pas interdit en politique, l'invective ne doit pas être la règle, me semble t-il) et le plus explicite en matière de programmes respectifs (c'est bien cela que l'électeur est censé évaluer, non ?) des différents candidats. Les analystes politiques soulignent également que le débat ne devrait pas changer fondamentalement la donne du vote à venir. Est-ce à dire que Dilma, largement en tête des intentions de vote (de 50 à 54% des votes valides en fonction des instituts selon les tous derniers sondages), devrait l'emporter dès ce dimanche, rendant inutile le passage devant les urnes le 31 octobre prochain pour un hypothétique second tour ? Quoi qu'il en soit, cela devrait être très serré, la surprise pouvant venir moins d'un rebond de Serra (que j'ai pourtant trouvé -pour une fois- très bon hier, mais moi je ne vote pas...) que d'un score de Marina au-delà des prévisions initiales (celles-ci étant autour de 15%).

Avant d'achever ce qui pourrait être mon dernier post de ces présidentielles brésiliennes (quoique non, je vous ferai de toute façon un petit papier dès dimanche soir...ou lundi matin !), un dernier mot pour vous témoigner ma stupéfaction de voir le Tribunal Suprême Fédéral (le STJ en portugais) changer au dernier moment les règles du scrutin : l'organe juridique le plus haut de l'Etat a en effet annoncé hier que finalement il n'était plus nécessaire pour les électeurs de présenter, en plus d'un document d'identité avec photos, son titre d'électeur. Quelle est cette démocratie où les modalités pour voter sont modifiées seulement trois jours avant le choix du plus important personnage de l'Etat ?? A qui profite le crime, se demande t-on ingénument ? Si c'est à quelqu'un, c'est à Dilma, dont l'électorat plus populaire et moins instruit aurait peut-être eu plus de mal à présenter les deux documents en bonne et due forme...

Allez un petit pronostic pour terminer, ça ne mange pas de pain ;)
Comme j'ai envie d'un second tour, je dis :
- Dilma, 48,5% des votes exprimés
- Serra, 29%
- Marina, 19,5%
A dimanche !

LinkWithin

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...